La pirogue, moyen de transport dans un bidonville de Lubumbashi

Article : La pirogue, moyen de transport dans un bidonville de Lubumbashi
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13 avril 2015

La pirogue, moyen de transport dans un bidonville de Lubumbashi

La pirogue vient de s’ajouter au nombre des moyens de transport à Lubumbashi, deuxième ville de la République démocratique du Congo et sa capitale économique. L’incontournable vélo, et la moto depuis quelques années, constituaient jusque-là le principal moyen de transport pour arriver dans certains bidonvilles.

Capture d'écran|Une traversée en pirogue sur la rivière Kafubu vers Cinq Ans, à Lubumbashi
Capture d’écran|Une traversée en pirogue sur la rivière Kafubu vers Cinq Ans, à Lubumbashi

Cinq ans est un de ces quartiers populaires défavorisés difficiles d’accès. Presque juxtaposé à la vaste et populaire commune Katuba, il faut traverser la rivière Kafubu, sur la rive gauche, pour y arriver. Un petit pont daté des années de l’indépendance et qui conduisait à des fermes, selon les explications des anciens, a servi jusqu’ici de seule liaison entre les deux quartiers. Ce pont est presqu’impraticable. Les dernières pluies tombées sur Lubumbashi l’ont submergé.

Une aubaine pour les pêcheurs

Plusieurs ont finalement trouvé leur salut (?) auprès des pêcheurs de fortunes sur cette rivière qui n’est pas du tout poissonneuse. De quoi réjouir ces travailleurs à la quête de quelques rares poissons pour vivre. Entre la recherche des espèces en épuisement dans une rivière jamais curée et pas du tout navigable, et se frayer une voie par laquelle conduire les passagers sur l’autre rive et empocher quelques Francs congolais, le choix est plus que clair pour ces déserteurs pêcheurs. La pirogue est devenue un moyen de transport assurant la liaison entre Cinq ans et Katuba. « Ce sont les motards qui ont commencé. Nous les avons rejoint après », explique un transporteur à vélo.

Mais elle ne semble pas du tout accessible à tous, la pirogue. 300 FC, parfois 500 FC le passage, certains ne peuvent carrément s’offrir ce moyen de  transport exceptionnel. Quoi, alors que le pont lui est foutu ? On vogue à pieds et ventres mouillés ! Même les transporteurs à vélo. Quitte à réserver une autre tenue pour poursuivre son déplacement sans alerter les curieux, surtout lorsqu’il ne pleut pas.

La dignité, s’achète

Capture d'écran|Des passagers au dessus des vélos traversant la rivière Kafubu à Lubumbashi.
Capture d’écran|Des passagers au dessus des vélos traversant la rivière Kafubu à Lubumbashi.

Il y a un mois, une équipe des reporters recevait des attaques verbales des garçons du quartier qui les accusaient de toujours filmer et ne jamais apporter des solutions. Enfin, ils pensent encore que lorsque la presse parle le pouvoir agit ! A propos des autorités, aucune promesse, aucune déclaration au sujet de ce quartier périphérique. Visiblement il ne représente aucun enjeu immédiat en termes d’économie : pas de marché, pas de grande école.  Pour tout, il faut se rendre à Katuba ou au centre-ville. Sa situation risque de ne pas changer avant longtemps. « On souffre. Qu’on pense à nous, dit un passager débout dans une pirogue. Les vélos et pirogues ne résolvent pas le problème. »

Il est arrivé, en effet, que de fausses manouvres des pagailleurs ou transporteurs vélo ou moto ont renversé dans l’eau les clients. Par bonheur, la rivière n’est pas profonde. Mais il est difficile de soutenir qu’elle est saine. Les riverains s’en servent parfois pour vider les fosses septiques. Des eaux des canaux provenant des entreprises minières et industries, en amont, finissent aussi dans cette rivière Kafubu dont des environnementalistes ont parfois appelé à la fin de la pollution. « Il en va de notre dignité, cette eau n’est pas bonne pour les femmes. Les corps des femmes sont à respecter » dit une femme à la descente d’une pirogue. Et une visiteuse du quartier portée dans une pirogue elle aussi d’ajouter : « Si j’avais une parcelle dans ce quartier, je déciderai immédiatement de l’abandonner et aller ailleurs. »

Capture d'écran |De jeunes filles traversant la rivière Kafubu à pieds, à Lubumbashi
Capture d’écran |De jeunes filles traversant la rivière Kafubu à pieds, à Lubumbashi

Dignité ? C’est un mot qui n’existe pas dans ce cadre. Il faut avoir de l’argent pour quitter ce quartier difficile. L’accès à Cinq ans est ainsi depuis environ 3 ans. A chaque tombée des grandes pluies, comme la semaine dernière, les habitants vivent la même situation.

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