Le Nigeria dans le monologue du président fondateur

Article : Le Nigeria dans le monologue du président fondateur
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1 avril 2015

Le Nigeria dans le monologue du président fondateur

Moi président fondateur, je n’appellerai jamais mon tombeur pour le féliciter. Je ne connaîtrais ni tombeur, ni infortune d’ailleurs, puisque le vainqueur, c’est moi. J’ai compris tout le secret. Je ne me laisse pas impressionner, moi, par ce pitoyable jeu d’aveux de naïveté. Alternance, Alternance, nous on a réalisé la nôtre une fois pour toutes, lorsque le colonisateur signait son départ ou quand nous chassions la dictature.

Une affiche de campagne, élection au Nigeria 2015. Source: www.aitonline.tv
Une affiche de campagne, élection au Nigeria 2015. Source: www.aitonline.tv

Mais ils sont fous ces pétroliers… ! Voyez-vous ça : ils refusent une stabilité méga-économique, la première du continent pour accueillir un putschiste. Oh là ! Mieux vaut un diable que l’on connaît qu’un saint dont on ne sait rien du tout. Jamais entendu ça ?  Ils n’ont pas d’emploi ? Mais dans quel autre pays trouvent-il sautant de chances que dans le leur ! Ma foi, si j’avais été nigérian moi !

Bad Luck !

Et ce Good Luck, quel bleu ! Depuis quand un si beau nom échoue sur cette terre ? Oh mes pères Kadhafi, Mobutu, et oui, Sékou… oh papa Mensonge[1], pourquoi une chance, une bonne chance échouerait-elle? Moi, croyez-moi, j’aime mon peuple et je ne serai jamais un ex. Je lui ai tout donné, il me doit tout. Quelle ingratitude conduirait un jour mon peuple à m’oublier ?

Bon, Good Luck n’est pas Good Luck. D’ailleurs, ça, c’est une malédiction pour mon peuple, ne l’oubliez surtout pas, s’il appelle dites-lui que le président fondateur est indisponible. Enfin, les présidents ont pour amis les présidents et les financiers./ (point barre !) J’ai toujours dit qu’on ne lâche pas, on n’est pas lâche nous. Mon peuple n’abandonne pas.

La faute à Boko Haram

A-t-on jamais vu chose pareille ? Organiser une élection pour la perdre ? On est où là ? Tout ce qui est bon pour mon peuple je le fais.

Source: sunnewsonline.com
Source: sunnewsonline.com

Attendez, j’ai comme une lumière… je vois. Je vois. C’est cette peste finalement qui coûte le départ de mon ex-ami ? Ce sont ces inconstants qui ont bouleversé mon plan. Avec Good, tout était good, tout s’arrangeait et du carburant coulait… Et moi qui comptais sur son pétrole ! Je ne veux plus entendre quelqu’un citer certains mots avant 11 ans dans ce pays. Je veux qu’on me dise que c’est exécutoire dès ce soir. Sont bannis : ballai, citoyen, y’en a, marre, sifflet, démocratie, même opposition. J’allais oublier, contestation aussi. Ce sont des mauvais mots, ils frisent l’insubordination et l’instabilité et l’insulte ! Oui, insulte à l’œuvre que j’ai jusqu’ici réalisée dans les larmes et la sueur. Les millions des litres de sang des compatriotes et des soldats versés par les rebelles et terroristes ne doivent pas être vains. Moi je ne me suis pas battu pour rien. Intégrité du territoire, sécurité, sûreté, loyauté, et tout ce qui est patriotique. Voilà qui doit être dit partout et à tous.

Le président fondateur contre Internet

J’allais oublier, on ne parle plus de Boko Haram, rébellions, traque, est du pays, accords, respect des droits de l’homme, tout ce qui y a rapport à cela. Rassurez-vous aussi que les médias ne reprennent pas les images sur l’échec de Bad Luck. Internet, Twitter, Cuisse-book… toutes ces immoralités sont interdites. Je m’en fous de l’économie et du reste. Quoi ? Vous ne comprenez pas toujours que je suis et reste un visionnaire ? Pourquoi doit-on prononcer publiquement des vilains mots comme ça ? Dites-moi, entre Fasse book et Cuisse book, qu’est-ce qui est bon ? Oui, qu’est-ce qui est moins grave, si vous voulez ? N’est-ce pas cuisse book ? Vous pourrez en effet en aucun jour parler des fesses avec papa, maman et sœurs et frères ! Voilà, désormais on ne dit plus Fasse-book ! Ah non, mais tout le monde prononce Fasse-book et non ce que tu dis là. Feize-book ? Vous êtes en retard et c’est une distraction que je ne peux laisser impunie. L’exemple de Bad Luck ne vous dit rien ?

[1] En swahili, « Bongo » (en plaçant l’accent tonique sur le premier « O » et en l’allongeant) signifie mensonge.

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Commentaires

Guy Muyembe
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Wallaï président fondateur n'est pas dupe, dè! ça s'appelle de l'humour croustillant.