Vous avez dit Lubumbashi ville pour la paix ?

Article : Vous avez dit Lubumbashi ville pour la paix ?
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23 juillet 2015

Vous avez dit Lubumbashi ville pour la paix ?

Depuis quelques années, Lubumbashi surprend : mourir ou tuer, c’est devenu chose facile, aussi simple que saluer un passant. Aussi surprenant que cela puisse être, on l’appelle « ville pour la paix ».

Depuis plusieurs mois, des balles crépitent nuitamment, des corps sans vie sont ramassés le matin à Lubumbashi, même si la seconde moitié de juillet connaît une relative accalmie. Le 5 juillet 2015, une mère est morte avec ses 4 enfants, dont un bébé consumé par les flammes, et une lycéenne qui attendait la publication des résultats du baccalauréat. Cela s’est passé à Kilobelobe, dans une périphérie de Lubumbashi, à l’est de la ville. Selon les habitants du quartier, la responsable d’une maison en location (la bailleresse) se querellait sans cesse avec sa locataire. Dimanche 5 juillet, vers minuit, elle n’a pas hésité à jeter de l’essence sur la maison de fortune, puis du feu ! Trois morts et deux blessés qui s’éteindront quelques jours après à l’hôpital. Les voisins qui acceptent de parler à la presse doivent se cacher, par peur des représailles de la part des forces de sécurité ! Difficile de comprendre pourquoi ?

L'insécurité à Lubumbashi vue par le dessinateur T-Tshim. Source: Mwana Inchi
L’insécurité à Lubumbashi vue par le dessinateur T-Tshim. Source: Mwana Inchi

Vol rime bien avec viol

A Kilobelobe encore, en juin 2015, un groupe de voleurs armés a attaqué trois maisons au cours d’une nuit. Un jeune homme a pris une balle au sexe ; il est décédé un jour après à l’hôpital. Deux jeunes filles ont été emmenées avec les voleurs. Parmi elles, une explique avoir réussi à s’échapper au moment où le violeur descendait son pantalon ; elle qui feignait de descendre sa « mini-jupe », a détalé, laissant derrière elle le violeur en effervescence, incapable de courir avec son pantalon au genou, pour la rattraper.

Voici seulement deux mois, le soleil allait s’arrêter un instant lorsqu’un groupe de voleurs armés a visité nuitamment le domicile d’un député provincial. Pour n’avoir pas donné une vingtaine des milliers de dollars comme exigé, les bandits ont tiré sur tout ce qui bougeait dans la maison, blessant gravement le député, mortellement son épouse et une fille. Ils ont pris la fuite  en emmenant deux autres filles qu’ils ont relâchées des heures plus tard !

La justice, la population s’en charge

Alors des officiels se sont réveillés, mais pour combien de temps ? Le pire était déjà en cours dans les quartiers de Lubumbashi : dépités par la justice « qui relâche les voleurs qui sont arrêtés et jetés en prison », les jeunes gens s’occupent de ceux qu’ils arrêtent : ils les brûlent. Plusieurs sont morts, y compris des soldats. Une espèce de « groupe d’autodéfense », appelé « groupe de veille » a été signalé dans plusieurs quartiers, à Gbadolite en l’occurrence.

Lubumbashi, le sud de la ville, route Kipushi. Source: https://losako.afrikblog.com/

Certaines autorités encouragent on ne peut plus clairement la population à « s’occuper » à sa manière, des voleurs qu’elle arrête. « Prenez-vous en charge », répète-t-on sans distinction de contexte. Le conseil est bien assimilé et les violences sont parfois inquiétantes. « La justice populaire est dangereuse, explique un activiste des droits de l’homme. Des innocents peuvent en souffrir, c’est toujours difficile de savoir tout de suite si la personne tenue est réellement coupable. Comment réparer alors ? »  Ce qui est étonnant, c’est que désormais, les voleurs ne font pas que voler : ils violent en plus, devant la famille.

Lubumbashi, ville pour la paix, c’est au passé. A la suite de la multiplication des attaques des may-may, des rumeurs et de la psychose, le dessinateur T-Tshim en doute, s’interrogeant : « Lubumbashi, ville pour la paix ou ville pour l’épée ? » Un enseignant en criminologie explique que Lubumbashi ville tentaculaire est débordée : il faut de nouveaux postes de police et surtout, accroître les effectifs de la police. Mais pour une réactivité importante de la police, le plan même de la ville doit être réaménagé ; il reste vieux de cent ans et certains quartiers restent inaccessibles : difficile d’intervenir en cas de danger.

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