Défenseurs des Droits humains versions web 2.0 à Lubumbashi

Article : Défenseurs des Droits humains versions web 2.0 à Lubumbashi
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9 novembre 2015

Défenseurs des Droits humains versions web 2.0 à Lubumbashi

Malgré leur pénétration assez considérable en RDC, les TIC n’avancent pas auprès des journalistes. Cette catégorie professionnelle est l’une des plus en retard en ce domaine et cela inquiète.

Maître Hubert Tshiswaka, avocat au barreau de Lubumbashi, dirige l’Institut des recherches en droits humains, IRDH. Sur sa table, deux téléphones connectés, avec wifi, What’s App, Facebook, Twitter et You tube, plus un PC dernier cri, à écran tactile. C’est un des rares activistes de la société civile qui ont compris que les médias sociaux sont porteurs de changements. Son rêve, influencer la RDC sur le plan des droits et libertés, y compris sur internet.

« Ce qui a permis de changer au Burkina Faso, par exemple, c’est la rapidité de la communication. Et cette rapidité, c’est la jeunesse, ce sont les réseaux sociaux. »

Les défenseurs des droits humains se tournent vers les médias sociaux à Lubumbashi
Le palais de justice de Lubumbashi. Photo M3 Didier, octobre 2015

Éduquer les congolais aux médias sociaux

Or, l’intégration de ces nouveaux médias est difficile en République démocratique du Congo. Pas qu’ils soient simplement difficiles d’accès parce qu’onéreux, mais surtout parce que, selon le juriste, les journalistes s’endorment. Les médias sociaux comme moyens de communication sont « difficiles, pas adaptés à notre société », la société congolaise. Il faut donc une éducation.

Plutôt, le problème se poserait en termes d’adaptation des utilisateurs aux médias sociaux. C’est d’abord faute d’attraction, d’exemples concrets. Nombre des journalistes sont dans la profession non pas par conviction, mais parce qu’ils n’ont pas trouvé mieux ailleurs. La conséquence c’est l’extension des pratiques qui n’améliorent pas l’image du journaliste comme le monnayage de l’information. La pratique ne surprend plus et semble n’indigner personne désormais.

« Les journalistes bloquent les défenseurs des Droits humains : ils demandent de l’argent même pour leur formation ! », s’étonne Me Tshiswaka.

L’argent d’abord, liberté d’expression après

Là, il y a deux cas explications. Soit la presse juge carrément de la communication, certaines sorties des défenseurs des droits humains, soit alors dans le contexte du juriste, ils bloquent réellement l’information parce qu’ils ont besoin d’argent. Dans ce cas, ils bloquent l’information. Ce qui désole Hubert Tshiswaka : plutôt que de soutenir, par exemple, la lutte pour la liberté d’expression,

« Les journalistes préfèrent aller vers ceux qui parfois détruisent ce principe, parce qu’ils donnent de l’argent»

La RDC, contrairement à plusieurs pays voisins, jouit d’une liberté d’expression relativement manifeste. Seulement, médias et acteurs de la société civile n’osent pas capitaliser cet acquis.

« Ce qui tue les congolais c’est l’ignorance de profiter de notre liberté ».

Pour atteindre les congolais, l’IRDH presqu’ainsi coincé par les médias, se tourne vers les médias sociaux. Au départ, en entre 2002 et 2005, les défenseurs des droits de l’homme envoient des mails à au moins 1000 personnes, avec espoir qu’au moins 10% les feront suivre à leurs amis. Mais Lubumbashi n’a alors qu’un seul cybercafé. L’opérateur est des rares qui ont une adresse mail, seul canal pour l’envoi des mails privés. « Parfois, le renseignement venait lire nos rapports, avec nous, derrière l’opérateur », explique le responsable de l’IRDH. Plus de secret alors. Heureusement pour les défenseurs des droits humains, puisqu’ils n’étaient pas arrêtés sur place. « Ils avaient besoin de tout comprendre : à qui nous envoyons, qu’est-ce que nous disons dans nos rapports ? »

Ensuite, ce fut une distribution gratuite des communiqués de presse sur 2 ou 4 pages, dans les rues de Lubumbashi, au grand dam des médias qui se trouvent contournés. « La population a beaucoup aimé. Mais comme toujours, d’autres personnes ne voulaient pas nous lire. »

Même disposant des connexions mobiles, les journalistes n'avancent pas assez dans les TIC en RDC
Un téléphone 3G donnant accès facile à Internet

Internet pour contourner les médias classiques à Lubumbashi

Avec les réseaux sociaux, mais aussi avec son site internet, l’IRDH compte désormais sur la présence de plus en plus accrue des jeunes sur internet pour parler des droits humains, distribuer des alertes et en sectionner parmi des milliers qui arrivent sur Tweeter et sur Facebook.

« Nous sommes en train de suivre les personnes pour les atteindre où elles sont… la société congolaise a besoin de luter, des journalistes ne l’ont pas compris et n’y participent pas ».

Maître Hubert Tshiswaka regrette que les journalistes ne se mettent pas à jour, en termes de l’usage et de l’appropriation des médias sociaux. Les politiques ont pris de l’avance sur plusieurs médias. Le phénomène Moïse Katumbi sur Twitter en est une éclatante illustration. Dans un mois, il a atteint 26.000 followers, dépassant Vital Kamerhe jusqu’alors premier de RDC.

Depuis, les politiques s’invitent de plus en plus sur les réseaux sociaux. Hubert Tshiswaka pense que tous n’ont pas les mêmes objectifs. « Les uns pour espionner, les autres pour leur publicité. » Et voilà que dans ce cas, internet congolais reste pauvre de contenu.

Pourtant, les mois et les années qui viennent vont être déterminants pour l’exercice des libertés en RDC. Y compris la liberté d’expression.

« Soit nous réussissons l’alternance et nous continuons en améliorant les acquis actuels, soit nous la ratons et nous basculons dans l’instabilité et le durcissement du régime. »

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