Femme journaliste, c’est ni mannequin ni miss

Article : Femme journaliste, c’est ni mannequin ni miss
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30 mars 2015

Femme journaliste, c’est ni mannequin ni miss

La honte, si elle prenait les pieds, nous tomberions tous les jours, dit une sagesse Lunda. Des vrais mannequins, des beautés, des couleurs originales… cela fait largement plaisir. Et c’est tout ? Non, la femme n’est pas faite pour plaire, pas non plus pour le contraire.

Excusez-moi si je vous ennuie par mon sermon, chères consœurs journalistes de Lubumbashi-RDC, rassurez-vous, cela m’ennuie personnellement de parler ainsi aux admirables journalistes que vous êtes. J’aurai dû vous aborder en privé, mais vous-mêmes vous avez porté au grand jour cette erreur.

Tshama Mwambuyi dans son atelier de menuiserie à Lubumbashi. Capture d'écran, Kyondo Tv
Tshama Mwambuyi dans son atelier de menuiserie à Lubumbashi. Capture d’écran, Kyondo Tv

Samedi 28 mars à Lubumbashi, vous décidiez de clôturer le mois de mars durant lequel tous nous avons célébré la femme, la femme vertueuse, cette femme qui bouge et innove pour rester autonome. C’est peut-être l’image de Tshama Mwambuyi qui se couvre d’une salopette et tient son rabot pour travailler les planches. Malgré ses mains devenues dures comme un homme, elle rentre à la maison le soir, avec un cœur de sourire qui remplit sa maison. On époux en est comblé. 30 jours donc de célébration de la femme par un défilé de mode au cours d’une soirée éclectique. Mais quel dommage quand c’est une femme qui croit et agit ainsi ? La beauté, le journalisme en a besoin en effet. Mais laquelle ? La déontologie journalistique décourage, mieux interdit la publicité « commerciale » par les journalistes. Mais à qui s’adresse-t-on ainsi et quelle est cette  déontologie quand beauté est une arme, tout autant que micro, caméra et stylo ? Oui, la beauté des journalistes fait des victimes, mais qui ne s’en plaignent pas. C’est le propre des victimes que les bourreaux protègent. Un peu comme dans le syndrome de Stockholm. Mais les mécontents de cette beauté insolente eux ne peuvent se taire.

Dandiner, journaliste ?

Deux confrères journalistes un homme et une femme, me disaient ce matin « comprends-les, nous sommes au Congo. » Dommage. On n’est pas en enfer ici, que je sache. Heureusement le ridicule ne tue pas. Enfin, jusqu’ici. Plusieurs femmes journalistes, de l’audiovisuel surtout, ont défilé en tenues diverses, à la mode, hormis quelques styles un peu coquins. Coquinerie ? Oui. Enfin, cela vous dérange-t-il ? Pourtant ça semble faire beau ménage avec journalisme ici ! Et, cela semble rimer avec mannequinat. Ce sont donc des mannequins qu’on a vu, pas des journalistes décidées d’agrémenter une soirée entre collègues. L’entrée était payante : 20 USD pour le départ, 50 pour le VIP et 75 pour le couple, etc… buffet assuré !

Anne-Marie Coudray, TF1. Source: Le Figaro
Anne-Marie Coudray, TF1. Source: Le Figaro

C’est donc devant ce public assez quelconque, je veux dire pas simplement fait des journalistes, puis devant la ville puisque des télévisions en ont diffusé des extraits, que les femmes journalistes et autres professionnelles de la presse se sont produites. On pouvait voir un ensemble de pagne, un libaya[1] jeune attaché légèrement au-dessus des seins, sexy donc ; une jupe qui touche à peine les genoux devant. Derrière pend un….. jusqu’aux pieds et le mannequin la prend en l’alternant agréablement entre ses mains et en l’ouvrant vers le public. La démarche elle est simplement entre le sexy et l’agréable : marche naturelle, dandinement, et tout le charme des mannequins. Qu’elles sont belles ces professionnelles de la presse, qu’ils sont beaux ces médias-mannequins.

Des publicitaires

Mais quel contraste ! Les organisations professionnelles féminines n’ont pas eu le temps d’alerter les jeunes femmes qui visiblement ignorent le danger de la publicité pour les journalistes. Pourtant, il y a eu parmi elles celles qui ont reculé après des discussions avec des journalistes plus expérimentés et anciens (hommes et femmes). Ce n’est donc pas qu’elles aient défilé comme mannequins qui choque, mais aussi l’idée qu’en agissant ainsi, elles joué les publicitaires. Les habits portés par plusieurs étaient des prêts à prêter des boutiques bien connues à Lubumbashi. Certains ont gardé habits de mannequin ont gardé des papiers des mesures et c’était visible. Se servir des journalistes ou animateurs des émissions pour promouvoir la mode, cela est un sacré coup de pub pour les boutiques, les marques et la mode. Mais combien parmi ces consœurs ont compris qu’on s’est servi d’elles comme publicitaires et mannequins au même titre que les professionnels de ce métier ?

Etonnant est aussi de constater que les organisations professionnelles, de la presse, sont restées silencieuses. L’indignation  des journalistes ne se cache pas : « vous ne savez pas réellement qui vous êtes dans la société », a lancé un des plus anciens journalistes de Lubumbashi. Il y a deux semaines, à propos de la journée internationale des droits de la femme, une journaliste de presse écrite lançait dans une émission : « les femmes ne doivent pas se servir de leur beauté pour séduire ou espérer progresser. Il faut se battre par le travail. » Ce sera peut-être là une des images fortes si non celle qui durera de mars 2015 pour la femme journaliste de Lubumbashi : un défilé de mode publicitaire (tolérez la redondance !).

[1] Une espèce de blouse en tissu de pagne africain qui prend plusieurs styles.

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