Les Gilets jaunes français vus du Congo

Article : Les Gilets jaunes français vus du Congo
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2 décembre 2018

Les Gilets jaunes français vus du Congo

J’ai vu, j’ai entendu parler les Gilets jaunes. A la télévision, bien entendu. Je les ai regardés avec étonnement. Je suis chaque fois sans mots, lorsqu’ils paraissent sur la place publique, en France.

Samedi encore, ils étaient là. « Pourquoi manifestent-ils? Que demandent-ils? » me demandait une amie. « Ils protestent, au départ, contre la hausse de prix de carburant. Depuis quelques temps, ils réclament encore plus…» ai-je répondu. Et « le président Macron ne cède pas? » « Tiens donc ! Même en France, le gouvernement fait pareil? » se surprend l’amie.

En France aussi ?

Là je me suis réveillé. Redressé dans mon fauteuil, je commençais à prendre les questions de mon amie très au sérieux. Oui, car je me pose la même question depuis que je regarde les protestants. Les Gilets jaunes à Paris.

Le jour où ces manifestations m’ont captivé, les Gilets jaunes étaient sur les Champs-Elysées. Ce jour-là, la France me surprenait à deux titres. D’abord, l’idée que les manifestants dérapent ou cassent même si cela n’a pas été prévu au départ. Et que les pouvoirs publics recourent à la langue de bois, les criminalisent ou les présentent comme insensés.

Mais aussi le niveau de brutalité de la police. « Vraiment comme on le vit parfois en Afrique, particulièrement au Congo-Zaïre », s’exclamait une autre camarade avec qui je travaille. Les Gilets jaunes occupaient les Champs-Elysées alors pour la première fois. Nous regardions la scène, en direct des Champs-Elysées sur une télévision française. Elle avait stoppé tous ses programmes en faveur du direct qui avait pris plusieurs heures.

Des violences policières seraient-elles universelles ?

Je me rappelle avoir vu un policier se déchaîner sur un manifestant qui n’avait pour armes que son gilet jaune, sa grande gueule et sa présence soutenue par d’autres, sans doute, plus dérangeantes. « Je n’imaginais pas l’Etat français, et sa police, capables de pareille violences », me suis-je dit.

Attention, procéder par des généralisations, « l’Etat français », « la police », est bien malheureux dans pareils cas. Mais les médias nous habituent à ça, que les débordements aient lieu ici (Afrique) ou là-bas (Europe). Assumons donc ici !

La scène était surréaliste. Mais je pouvais la comprendre. Sur les Champs-Elysées, ou place de la Bastille, les manifestants s’en sont pris à des symboles du pouvoir. Et Paris en prenait un coup, en termes d’image. C’est difficile d’imaginer que la police, ni Macron quelque extrêmement démocratique qu’on puisse l’imaginer, ne pouvaient laisser faire. Ça, on comprend. Mais la police n’avait-elle que la brutalité, parfois l’inutile violence pour gérer la situation ?

Ici, la police maintient de l’ordre avec des armes létales

Je me suis alors mis à penser à l’image que nous avons et contribuons à faire circuler de notre police congolaise, ou ailleurs chez des présidents fondateurs. Je l’avoue négative, globalement. Peut-être que nous sommes trop durs envers nous-mêmes. Peut-être que c’est propre à des policiers de prendre pour cible des manifestants… Même si cette police s’est montrée capable d’attitude vraiment protectrice et neutre, nous la critiquons. C’est peut-être aussi parce qu’elle se montre plus au service du pouvoir que de la population. Mais là, en France, le rapprochement devient parfois possible entre les deux polices du monde…

Peut-être que les deux, polices d’ici et de là-bas, ont en eux des explications sociologiques qui les opposent, et que je ne saisis pas jusqu’ici. A la seule différence, peut-être, au Congo, que la police va mettre de l’ordre avec des armes létales et dégainent très facilement sur des civils désarmés.

Mais quand je pense à ce policier français attaquant un Gilet jaune sans gêne, je me dis que s’il avait une kalache au point, il zigouillerait lui aussi ses compatriotes. Comme cela a lieu souvent ici. Ce que j’ai vu de peut être positif, enfin, c’est se sachant filmés, les flics n’ont pas attaqué les équipes de reportage qui annonçaient au monde ces scènes surprenantes.

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